« Mama, I can’t breathe, I can’t…breathe »
Lettre ouverte de Julos Beaucarne
» Amis bien aimés, Ma Loulou est partie pour le pays de l’envers du décor, un homme lui a donné neuf coups de poignard dans sa peau douce. C’est la société qui est malade, il nous faut la remettre d’aplomb et d’équerre, par l’amour et la persuasion.
C’est l’histoire de mon petit amour à moi arrêté sur le seuil de ses 33 ans. Ne perdons pas courage ni vous ni moi. Je vais continuer ma vie et mes voyages avec ce poids à porter en plus, et nos deux chéris qui lui ressemblent. Sans vous commander, je vous demande d’aimer plus que jamais ceux qui vous sont proches. Le monde est une triste boutique, les cœurs purs doivent se mettre ensemble pour l’embellir, il faut reboiser l’âme humaine. Je resterai sur le pont, je resterai un jardinier, je cultiverai mes plantes de langage. À travers mes dires, vous retrouverez ma bien aimée, il n’est de vrai que l’amitié et l’amour. Je suis maintenant très loin au fond du panier des tristesses ; on doit manger chacun, dit-on, un sac de charbon pour aller au paradis. Ah comme j’aimerais qu’il y ait un paradis, comme ce serait doux les retrouvailles… En attendant, à vous autres, mes amis d’ici-bas, face à ce qui m’arrive, je prends la liberté, moi qui ne suis qu’un histrion, qu’un batteur de planches, qu’un comédien qui fait du rêve avec du vent, je prends la liberté de vous écrire pour vous dire ce à quoi je pense aujourd’hui : je pense de toutes mes forces, qu’il faut s’aimer à tort et à travers. »
Julos. Nuit du 2 au 3 février 1975
Georges Floyd assassiné le 25 mai 2020
Une belle découverte. Merci
Merci pour m’avoir fait découvrir ce texte. Quelle force d’âme : exprimée avec de tels mots, si simples, en pareilles circonstances !
Oui Odile, merci. J’ai des souvenirs très précis de cet évènement tragique. Cette lettre, je l’avais oubliée, mais ce qu’elle dit, cet appel à l’amour, à la vie, à l’espoir cité par Marie-Pierre, me parait fort et salvateur….
Merci Odile pour nous rappeler cette superbe lettre dans ce triste moment, elle convoque l’espoir, celui qui fait vivre.