Poème à mon frère blanc
Poème à mon frère blanc
Cher frère blanc,
Quand je suis né, j’étais noir,
Quand j’ai grandi, j’étais noir,
Quand je suis au soleil, je suis noir,
Quand je suis malade, je suis noir,
Quand je mourrai, je serai noir.
Tandis que toi, homme blanc,
Quand tu es né, tu étais rose,
Quand tu as grandi, tu étais blanc,
Quand tu vas au soleil, tu es rouge,
Quand tu as froid, tu es bleu,
Quand tu as peur tu es vert
Quand tu es malade, tu es jaune,
Quand tu mourras, tu seras gris.
Alors, de nous deux,
Qui est l’homme de couleur ?
Léopold SEDAR SENGHOR (1906 – 2001)
Poème liminaire (Hosties noires)
Poème liminaire (Hosties noires)
À L.-G. DAMAS Paris, avril 1940
Vous Tirailleurs Sénégalais, mes frères noirs à la main chaude sous la glace et la mort
Qui pourra vous chanter si ce n’est votre frère d’armes, votre frère de sang ?
Je ne laisserai pas la parole aux ministres, et pas aux généraux
Je ne laisserai pas – non !- les louanges de mépris vous enterrer furtivement.
Vous n’êtes pas des pauvres aux poches vides sans honneur
Mais je déchirerai les rires banania sur tous les murs de France.
Car les poètes chantaient les fleurs artificielles des nuits de Montparnasse
Ils chantaient la nonchalance des chalands sur les canaux de moire et de simarre
Ils chantaient le désespoir distingué des poètes tuberculeux
Car les poètes chantaient les rêves des clochards sous l’élégance des ponts blancs
Car les poètes chantaient les héros, et votre rire n’était pas sérieux, votre peau noire pas classique.
Ah ! ne dites pas que je n’aime pas la France -je ne suis pas la France, je le sais-
Je sais que ce peuple de feu, chaque fois qu’il a libéré ses mains
A écrit la fraternité sur la première page de ses monuments
Qu’il a distribué la faim de l’esprit comme de la liberté
À tous les peuples de la terre conviés solennellement au festin catholique.
Ah ! ne suis-je pas assez divisé ? Et pourquoi cette bombe
Dans le jardin si patiemment gagné sur les épines de la brousse ?
Pourquoi cette bombe sur la maison édifiée pierre à pierre ?
Pardonne-moi, Sira-Badral, pardonne étoile du Sud de mon sang
Pardonne à ton petit-neveu s’il a lancé sa lance pour les seize sons du sorong
Notre noblesse nouvelle est non de dominer notre peuple, mais d’être son rythme et son cœur
Non de paître les terres, mais comme le grain de millet de pourrir dans la terre
Non d’être la tête du peuple, mais bien sa bouche et sa trompette.
Qui pourra vous chanter si ce n’est votre frère d’armes, votre frère de sang
Vous Tirailleurs Sénégalais, mes frères noirs à la main chaude, couchés sous la glace et la mort ?
Merci J.Peire !
Est-ce que tu voudrais nous l’enregistrer en occitan ?
Ce serait une chouette contribution
A bientôt
Anne B
Ah! ça tombe bien. Je viens de me procurer La pensée blanche de Lilian Thuram. Cittation :
« Un soir, Je décide de téléphoner à mon ami d’enfance, Pierre :
« Allô, Pierre ? ça va ?
– -Salut, Lilian, ça va et toi ?
– Dis-moi, je veux te poser une question.
-Vas-y.
– Pierre, est-ce que tu as le sentiment d’être blanc ?
Je sens une hésitation au bout du fil.
« Quoi ? Je ne comprends pas bien.
– Pierre, tu es d’accord que je suis noir ?
– Ben, ouais.
– Si moi je suis noir, toi tu es quoi?
– Ben… je suis normal. »
Je me suis mis à rire.
A bientôt. FV
Simple et fort
Essai de traduction en occitan-niçois :
Poema au mieu fraire blanc
Car fraire blanc,
Quora siáu naissut, èri negre,
Quora ai creissut, èri negre,
Quora siáu au soleu, siáu negre,
Quora sáu malaut, siáu negre,
Quora creperai, serai negre,
Mentre tu, òme blanc,
Quora siás naissut, ères ròse,
Quora as creissut, ères blanc,
Quora vas au soleu, siás roge,
Quora as frei, siás blu
Quora as paur, siás verd,
Quora siás malaut, siás jaune,
Quora creperàs, seràs gris.
Alora, de nautres doi,
Cu es l’òme de color ?