Née en 1974, Valérie Canat de Chizy a publié depuis 2006 une vingtaine de recueils de poésie ainsi que deux récits. Elle est présente dans une dizaine de revues de poésie. Elle a une activité de critique régulière pour les revues Terre à ciel et Verso. Elle a réalisé plusieurs livres pauvres en collaboration avec des artistes.

Son blog : http://verrementhe.blogspirit.com

Bibliographie sélective

  • La langue des oiseaux, poésie, éd.  Henry, 2023
  • Les mots dessinent les lèvres, poésie, éd. Les Lieux-Dits, 2021
  • caché dévoilé, poésie, Jacques André éditeur, 2019
  • Nuit », poésie, avec des encres de Colette Reydet (éd. Ce qui reste, 2018
  • l’écriture la vie, poésie, éd. Le Petit Rameur, 2017
  • Je murmure au lilas (que j’aime), poésie, éd.  Henry, 2016
  • La clarté jaune du soleil, poésie, éd. Les éditions du Petit Flou 2016
  • Poetry, poésie, Jacques André éditeur, 2015
  • Le bruit des abeilles,poésie, avec Cécile Guivarch, éd. La Porte, 2014

Valérie Canat de Chizy         La langue des oiseaux           Editions Henry 2023

p.12-13

Je me suis souvent interrogée sur la nécessité d’écrire sur le passé. Au début de ce récit j’étais partie sur l’idée d’être dans le présent. De rester à la surface du lac, de ne pas plonger dans ses profondeurs. Mais c’est impossible. Le passé n’est pas derrière moi, il est en moi. Il   vit à l’intérieur. Dans mes cellules, dans mes rêves, dans ma manière de penser, de concevoir le monde, de vivre, même. Je ne peux pas nier avoir été un jour cette petite fille, avoir vécu tel ou tel événement. Je ne peux pas fermer la porte. C’est comme une respiration. Si je décide de ne vivre qu’au présent de ne plus écrire sur mon histoire je bloque ma respiration, je fige la vie. La sève ne circule plus dans l’arbre, les racines sont coupées. Pour moi, ne vivre que dans le présent, c’est figer le temps. Le passé, c’est la vie, aussi.

p.36-37

J’oublie parfois qui je suis et qui j’ai été. J’ai été cette petite fille sourde dans un hôpital, une dame à la jupe fleurie s’est penchée vers moi, me pinçant gentiment la joue et me parlant d’une voix enjouée. J’ai été une fillette différente, suivie par des professionnels du corps médical et socio-éducatif et qui ne pouvait pas avoir une scolarité comme les autres enfants. J’ai appris dès que j’ai perdu l’audition à lire sur les lèvres, car les appareils auditifs seuls ne me permettent pas de comprendre ce que l’on me dit. J’ai travaillé dur pour ne pas perdre ma voix car je ne m’entendais plus parler. Je pense à tous les enfants différents, à ceux qui n’auront jamais la chance de vivre une vie normale. À ceux qui auront toujours besoin d’être suivis et accompagnés. J’ai grandi et j’ai connu des troubles de la communication, je me suis enfermée dans ma bulle de silence. J’ai connu la solitude et la grande tristesse. J’ai trouvé dans l’écriture un moyen d’expression. J’ai découvert la bulle protectrice de la poésie qui m’a enveloppée d’un halo de lumière et de chaleur. J’ai rencontré des personnes qui m’ont comprise. Je perds la mémoire. J’oublie qui je suis et qui j’ai été.

Nous avons entendu Marilyne lire le texte de Valérie Canat de Chizy lors de notre première scène ouverte aux Diables bleus le 23 juin dernier. Cette lecture a beaucoup impressionné l’assistance c’est pourquoi nous avons demandé à Marilyne qui l’a déjà mise en ligne sur la page de Recours au poème. Qu’elle en soient remerciées ici toutes deux.
Enseignante en retraite, poète, diseuse et traductrice, née dans les Flandres et partageant sa vie entre Nice et Parme – passionnée donc par tout passage – transmission, translation, déplacement, voyage, errance d’une frontière, d’une langue, d’un rêve à l’autre.
Elle se consacre désormais à sa passion pour l’art et le langage, et à cette problématique de la traduction et du passage des langues. Elle codirige la revue Recours au Poème,  et organise des rencontres littéraires et anime des ateliers d’écriture.
Elle co-anime également les Jeudis des mots au café culturel Chez Pauline, rue Bavastro à Nice et anime la revue en ligne jeudidesmots.com.