« Femmes afghanes :  le cri » au théâtre Magica vendredi soir 15 mars

Il aurait bien fallu écarter un peu les murs du théâtre Magica tant nous étions serrés pour écouter et regarder la dernière création des Mots à la bouche « Femmes afghanes : le cri ».
Etaient au rendez-vous : Hossein Taheri et son setâr, instrument iranien proche d’une mandoline, et pas moins de 8 lecteur-ices !
Heureusement ils n’occupaient pas tous la scène, très réduite, en même temps.
Ils ont fait la part belle à l’autrice du roman « Danser dans la mosquée », Homeira Qaderi, dont plusieurs extraits du récit autobiographique ont été lus au cours de la soirée.
D’autres autrices et poétesses ont été choisies pour éclairer la réalité particulièrement dramatique pour les femmes depuis le retour des talibans en Afghanistan en 2021.
Ainsi il fut question des « basha-posh » les enfants-filles auxquelles on fait endosser un rôle de garçons quand il n’y en a pas dans la famille (dans « La perle et la coquille » de Nadia Hashimi) ; furent évoqués dans plusieurs extraits les nombreux traitements violents assénés à ces femmes, et égitimés par l’autorité d’un ministère de la « propagation de la vertu et de la prévention du vice ».

Et bien sûr les burqas ne furent pas oubliées, dans le texte d’Asne Seierstad « Le libraire de Kaboul ». Au cours de cette écoute, on conçoit que ces femmes sont totalement invisibilisées, exclues de l’espace public, niées dans leur existence même. …/…

Crédit photos : Gabriel Moreau et Daniel Cabrol

…/… L’ensemble du spectacle est cependant l’illustration de la conviction qu’ont ces autrices de la force de la poésie, de la langue écrite, comme espace de liberté et comme moyen d’action, un espace dans lequel elles peuvent tout dire, même le blasphème, l’interdit, les tabous.
Une forme particulière de la poésie qui nous est présentée est le landay, qui est écrit surtout en langue pashto, sorte de haîku, poème très court que les femmes écrivent et tansmettent de manière clandestine pour exprimer leurs espoirs, leurs peines parfois avec un certain humour, de la dérision…

Au sortir de la soirée on entend des propos très enthousiastes, et en même temps révoltés par la radicalité des talibans qui semble sans fond.
Concluons avec une des poétesses lues dans la soirée : Nafissa Azhar, éditée dans l’anthologie de Bruno Doucey :
              «  Entends la souffrance des femmes encagées
                 Elles gémissent dans les noirs voiles des ténèbres
                 Entends le cri sans voix d’une femme au silence condamnée. »

Sortie du théâtre dans la ruelle Saint André

Quelles œuvres ?

Homeira Qaderi, dans un récit bouleversant « Danser dans la mosquée  » raconte qu’elle a dû fuir l’Afghanistan à cause du divorce avec son mari (prenant une deuxième épouse ) ;  elle a alors dû laisser son fils pour plusieurs années.
Nadia Hashimi « La perle et la coquille », Ed. Milady, 2014
Asne Seierstad. Le Libraire de Kaboul   Ed. J.C Lattès 2003
Fawzia Koofi, militante politique, Lettres à mes filles Ed. Michel Lafon 2022.
Un seul homme : Atiq Rahimi avec « Syngué sabour, pierre de patience » qui obtint le prix Goncourt en 2008.
Sur le plan poétique : des landays, courts poèmes écrits et transmis clandestinement par des femmes restées au pays pris dans différentes anthologies
Le cri des femmes afghanes, anthologie établie et traduite par leili Anvar, Editions Bruno Doucey 2022
Le visage cahé de la femme afghane Femmes poétesses d’Afghanistan Anthologie de poèmes recueillis par Massoud Mirshahi, Ed. Khavaran 2000

Nulle prison n’enfermera ton poème, anthologie de poèmes réunis par Somaia Ramish, Oxybia éditions, 2023