Jean-Michel Moreau le jeune, portrait de Robespierre
Adelaide Labille-Guiard, « Portrait de Robespierre, député à l’Assemblée Nationale »

          Dans ce discours « sur les subsistances », le 2 décembre 1792, Robespierre s’adresse à la Convention alors que se multiplient les révoltes contre la cherté du pain.
Le peuple a-t-il fait une révolution pour voir substituer à l’aristocratie des nobles celles des riches ? Son propos résonne à nos oreilles, car il touche un point essentiel : « le droit à l’existence… seule propriété restant aux impropriétaires ».

 Jean-Jacques C.

 

Le droit à l’existence.

          « La liberté indéfinie du commerce, et des baïonnettes pour calmer les alarmes ou pour apaiser la faim, telle fut la politique vantée de nos premiers législateurs.[…] Le négociant peut bien garder, dans ses magasins, les marchandises que le luxe et la vanité convoitent jusqu’à ce qu’il trouve le moment de les vendre au plus haut prix possible ; mais nul homme n’a le droit d’entasser des monceaux de blé, à côté de son semblable qui meurt de faim.
Quel est le premier objet de la société ? C’est de maintenir les droits imprescriptibles de l’homme.
Quel est le premier de ces droits ? Celui d’exister. La première loi sociale est donc celle qui garantit à tous les membres de la société les moyens d’exister ; toutes les autres sont subordonnées à celle-là. […] Les aliments nécessaires à l’homme sont aussi sacrés que la vie elle-même. Tout ce qui est indispensable pour la conserver est une propriété commune à la société entière. Il n’y a que l’excédent qui soit une propriété individuelle, et qui soit abandonné à l’industrie des commerçants.
Toute spéculation mercantile que je fais aux dépens de la vie de mon semblable n’est point un trafic, c’est un brigandage et un fratricide. […]

Comment donc a-t-on pu prétendre que… toute règle sur la vente du blé était une atteinte à la propriété, et déguiser ce système barbare sous le nom spécieux de liberté du commerce ? […] N’oubliez pas que la source de l’ordre, c’est la justice, que le plus sûr moyen de la tranquillité publique, c’est le bonheur des citoyens. »